• Chaque jour, sur son blog, Minik Do égrène ses pensées sauvages.
    – Les pensées domestiques aussi. Il lui arrive même de me choisir comme sujet, nous confie sa chatte. Ça commence dans l'odeur du café fumant*, puis le regard se porte vers la fenêtre. Il y a toujours un pinson, une mésange, une feuille morte pour l'intéresser.
    À le lire, on suit ses parcours dans sa ville. Nez au ciel pour déchiffrer l'écriture des nuages ou des avions. Nez dans le caniveau pour un dernier hommage aux confettis. Œil sur le reflet d'une vitrine, le remou d'un plan d'eau, une araignée, un seneçon. Oreille qui recueille des confidences dans un café...
    Tous les sens en éveil. Doigt sur le déclencheur du Kodaque. La photo éclaire – ou non – le poème.

    La forme est brève. On parle de haïku. Ce n'est pas un gros mot**.

    Pour sa collection Choisi, Jacques Renou en a retenu une soixantaine qu'il a amoureusement imprimés en typographie sur un beau papier. Les fines linogravures de Thierry Gaudin jouent en contrepoint des poèmes.

    J'ajoute que l'ami Jean-Claude Touzeil ouvre le portfolio.
    Le passage de l'écran au papier, du caractère calibré du logiciel au caractère de plomb, de la photo à la linogravure... nous font redécouvrir l'univers de Dominique Borée***.

    Et, sans parler de la subtile odeur de l'encre, ceci a quelque chose de réjouissant.

     

    Calendrier

    Photo Jacques Renou      

     

    Dominique BORÉE, Calendrier
    Portfolio composé en caractères mobiles en plomb
    Tirage limité à 55 exemplaires signés. 32 pages.
    15 linogravures originales de Thierry Gaudin.
    Avant-lire de Jean-Claude Touzeil, après-lire de Jacques Renou.
    + un petit bonus de Thierry Gaudin.

     

    Disponible à l'Atelier de Groutel, 25 Groutel, 72610 CHAMPFLEUR.

    18 € + port 1 €. Chèque à l'ordre de l'Atelier de Groutel.



    * Pour un haïku fumant !

    ** Prononcé par un japonais (source : forvo.com)

    *** C'est aussi la fin de l'anonymat !


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  • Sansonnets

     

    Si Boris Vian avait connu les Cent sonnets de René Agnès, nul doute que celui-ci l'eût ravi :

     

     

    À PROPOS DE LA CIGARETTE
    fumée par Mme X***, après notre déjeûner à Pontlevoy
    du 3 octobre 1872


    Après le déjeûner, Madame... est guillerette,
    Non pas qu'un doux nectar ait produit cet effet :
    Elle fume avec nous la fine cigarette,
    Et sa gaîté provient de ce brillant haut fait.

    Elle embellit par lui notre petite fête.
    Ce serait bien à tort d'en cacher le secret ;
    Puisqu'à nous, au contraire, elle a su tenir tête,
    Décernons-lui céans un glorieux brevet.

    De sa bouche divine une blanche fumée,
    En tourbillons légers s'échappe parfumée.
    Notre œil ravi la voit voltiger dans les airs.

    TERCET DÉDICATOIRE.

    Madame, gloire à vous ! à vous honneur suprême !
    Vous le méritez bien. Je me dois à moi-même,
    En chantant vos exploits, de vous offrir ces vers.

    Pontlevoy, 3 octobre 1872.



    Source : gallica.bnf.fr



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  • Le dimanche, c'est poésie.

     

    Contre Labienus


    Quand nous te demandons pourquoi
    La pincette, à chaque semaine,
    S’occupe à dépiler chez toi
    Le sein, le bras, la cuisse, l’aisne ;
    Guy, c’est, à ce que tu nous dis,
    Le soin de plaire à ta Philis
    Qui t’inspire cette manière.
    Nous le voulons croire ; mais, Guy,
    Apprends-nous en faveur de qui.
    Tu fais dépiler ton derrière ?

    La Monnaie, à l'imitation de Martial

    bonnetsapoil.jpg

    Source illustration : les Bonnets à poil ; BNF

     


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  • « La maison d’arrêt est composée de cellules de 12 mètres carrés où cohabitent jusqu’à six personnes alors que, selon les normes définies par l’administration pénitentiaire, il ne devrait pas y en avoir plus de deux. Chaque cellule comporte trois lits superposés d’un côté, deux lits superposés de l’autre côté et souvent, entre les deux rangées de lits, un matelas posé à même un sol crasseux et humide où circulent des rats et des cafards.»

     

    On dirait du Albert Londres, c'est du Journal officiel*Carré de l'hypothalamus

    Pour respirer, ce poème de Guy Lévis Mano, typographe et poète**.

     

    Peupler la prison


    Il était le juge. Les cinq geôliers amenèrent le prisonnier. Le juge regarda les yeux affamés du prisonnier. Il y vit des fleuves, des prairies, des coteaux, quelques fleurs, et aussi des oiseaux qui les parsemaient. Puis il regarda les yeux gris des geôliers. Il n'y vit que des judas, des serrures séparées de leurs clefs, et des murailles. Le juge parla : Que le prisonnier s'en aille récupérer son fleuve, sa plaine et ses oiseaux. Il suffit de geôliers pour peupler la prison.

     

     

     

    * Journal officiel du 6 décembre 2011, article 72, Recommandations du Contrôleur général des lieux de privation de liberté prises en application du deuxième alinéa de l'article 9 de la loi du 30 octobre 2007 et relatives au centre pénitentiaire de Nouméa (Nouvelle-Calédonie)

    ** Guy Lévis Mano, Loger la source, éditions Folle Avoine, 2007.


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  • Je verrais d'un bon œil qu'un journal qui tient une bonne nouvelle la publie deux jours de suite. Ou trois s'il la juge vraiment très bonne.

    Ce geai mérite de prolonger son séjour ici.

    Pour ne pas lasser néanmoins, je rafraîchis la légende. Plus encore et mieux ! Ce sera un poème de Jean Féron.

      Geai des chênes - photo Maïette

     

    Au pied du chêne foudroyé
    une plume de geai
    signe
    qu'aucun poème
    n'est jamais tout à fait
    perdu

    Jean Féron

     

     

    Une plume de geai, édition Au pied de la lettre, 2002. Recueil agrémenté d'une véritable plume de geai des chemins creusois.


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  • Où m'entraîne une recherche sur l'origine du nom donné à la mésange

     

    nonnette2.jpg « On rapporte qu'un singe, un singe merveilleux,
    Que les Égyptiens consacraient à leurs dieux.
    Indiquait, en pissant douze fois en douze heures,
    Les pas du Temps qui fuit vers les sombres demeures.
    La nuit, lorsqu'on veillait, vous comprenez combien
    Était avantageux un semblable moyen,
    Aussi, chaque nonnette avait, dans sa cellule,
    Un petit cénophal en guise de pendule. »


    Eugène Berthier, Pyrame et Thisbé, poème comique en quatre chants, Paris, 1853

    Cénophal : autre nom du cynocéphale


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  • Tango pour José

    « La mort c'est comme la vie   Ça n'existe pas  » écrivait José.*

    Ben si. Les deux.

     

    José Millas-Martin, poète, est décédé ce début décembre.

     

    Topa lui rend hommage sur son blog biloba.

     

    L'image ci-contre est un brouillon pour un des poèmes du Tango pour José, aux éditions Donner à Voir.

     

    GUERRE


    Trois êtres Paniers poireaux Torchon Biberon couchés terre Garçonnet sur bras replié Petite fille nue Bras ouvert Ficelles de sang noir Yeux Narines Bouches Près mur Mère bandeau Sang Trempe sang Bras gauche Paume ouverte enlace sa fille retournée vers le sol
    Le monument et les discours pour plus tard


    José Millas-Martin
    (Trayecto-Trajet – éditions Sépia, 1985)

     

    * Du poème Hier. Le titre est emprunté à Bien fait vite fait (« Belle foutaise  Venons de l'éternité  Y retournons »). Ces deux textes dans Posologie usuelle, éditions La Bruyère, 1987, repris dans l'anthologie À mots rompus.


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